Alors que la Libération n’est qu’un espoir, les mouvements de Résistance, partis politiques et syndicats créent, il y à aujourd’hui 80 ans le CNR à l’origine du modèle social français, qui inspirera les nationalisations, la création de la Sécurité sociale, les comités d’entreprises et tant de lois sociales et économiques, qui projetteront la France dans les trente glorieuses.
Ainsi le 21 octobre 1945, lors de l’élection de l’Assemblée constituante le PCF, Le MRP et la SFIO, totalisent 75% des voix et se réclament tous trois du programme du CNR.
La naissance des Jours heureux.
La naissance du CNR a lieu lors de la réunion qui se tient le 27 mai 1943 dans le 6ème arrondissement de Paris, en présence de 16 hommes, autour de Jean Moulin, Pierre Meunier et Robert Chambeiron, futurs président, secrétaire général et secrétaire général adjoint.
Pourtant il n’allait pas de soi d’associer des forces aussi différentes que 8 mouvements de résistance, 2 centrales syndicales CGT et CFTC et 6 partis politiques allant des communistes à la droite républicaine.
Au-delà de la complication inhérente aux impératifs de clandestinité, il fallait surmonter les clivages historiques et politiques.
Ainsi, si les divergences entre les différentes composantes du CNR ne disparaissent pas, elles laissent place à un espoir commun et inaugure une situation nouvelle non seulement un cadre unitaire qui organise désormais les principales composantes des résistances intérieures, mais l’autorité du Général de Gaulle sur l’ensemble des résistances est reconnue par tous.
Suite à l’arrestation de son président Jean Moulin le 21 juin 1943 arrêté à Caluire sur dénonciation et mort le 8 juillet, le CNR doit se réorganiser et définir ensemble ses règles de fonctionnement.
Un bureau permanent constitué de 5 membres est mis en place, ainsi qu’un système de commission relié au bureau afin de trouver pour l’ensemble des questions traitées l’unanimité.
Et c’est le 15 mars 1944 que fut ainsi adopté par le CNR le programme des Jours heureux qui traite de l’insurrection armée et des mesures à adopter à la Libération.
“Une société plus juste“
Le CNR est à l’origine par l’entremise du Ministre du travail de l’époque A.Croizat (1), des premières ordonnances sur la Sécurité Sociale (octobre 1945), de la loi sur les prestations familiales (août 1946), sur les assurances vieillesse (septembre 1946), de la loi sur les Comités d’entreprises, au statut des délégués du personnel dans les entreprises (1946), projet de loi relatif aux conventions collectives (novembre 1946).
Il a lancé le rétablissement de la semaine de 40 heures, la suppression de l’abattement de 10% sur les salaires des femmes, le droit de vote et d’éligibilité des femmes, une augmentation de 130% des retraites, 3 semaines de congés payés pour les jeunes travailleurs, le projet de loi sur l’aide de l’État aux catégories sociales économiquement faibles (1946), ainsi que le projet de loi sur la prévention et la réparation des accidents du travail et maladies professionnelles (1946).
Les syndicats indépendants sont reconstitués.
Mais aussi de la nationalisation de la Banque de France et des grandes banques de crédit (décembre 1945), de la nationalisation du gaz et de l’électricité et des grandes compagnies d’assurances (avril 1946), de la création des Charbonnages de France et nationalisation de toutes les Houillères (mai 1946), de la création de l’ENA (octobre 1945), du statut de la Fonction Publique (octobre 1946).
Le CNR organise aussi l’indépendance de la presse “à l’égard de l’État, des puissances d’argent et des influences étrangères“.
Le patronat est mécontent mais, discrédité pour avoir largement collaboré pendant l’Occupation avec les Allemands, il n’a pas les moyens de s’y opposer surtout face à une Cgt qui revendique plus de 5,5 millions d’adhérents à l’époque. #Rapport de force.
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(1) Décédé en février 1951 à l’âge de 50 ans, dans son éloge funèbre, le Président Edouard Herriot, s’exprima en ces termes, après avoir retracé la longue carrière du disparu : « En juillet 1950, il connut une profonde peine : son fils, Victor, Roger Croizat, ouvrier électricien, trouva la mort à Lyon, dans un accident du travail. J’ai compati à la douleur du père, il le savait. Il suit de près son enfant dans la tombe. On comprend que les travailleurs se montrent à ce point émus par la disparition de celui qui leur fut si étroitement dévoué.
Ministre du Travail de 1945 à 1946 et en 1947, il leur disait un jour : J’entends demeurer fidèle à mon origine, à ma formation, à mes attaches ouvrières et mettre mon expérience de militant au service de la Nation. »
« Reconnaissons qu’il est demeuré fidèle à ce programme. »